
Henri Kinkead est familier dans la scène musicale locale, travaillant avec beaucoup d’artistes ainsi qu’en tant que duo Kinkead. Son projet solo, sous le nom de Héron, explore la musique trad et le patrimoine québécois, et dans le premier EP, Fontaine, les sons sont doux avec des touches folkloriques et les paroles se lisent comme des contes.
Comme Henri explique dans notre entrevue, l’intérêt pour le folklore est venu plus tard dans sa vie, sous la forme d’une « envie de découvrir le folklore moi-même, en tant qu’adulte ». Par conséquent, Héron est un exemple de la beauté qui existe dans la collaboration et la recherche. C’est aussi une autre direction musicale qui intensifie son rôle dans la scène culturelle québécoise.
Tu fais de la musique avec ton frère Simon, en tant que duo Kinkead, et tu collabores aussi avec beaucoup d’autres musiciens. Donc comment Héron a-t-il commencé? Est-ce que ce projet a toujours été dans ta tête?
Ça fait longtemps que j’avais envie de faire un projet solo avec juste mes chansons. La direction artistique s’est plus développée quand je suis arrivé à Montréal, il y a environ trois ans. J’avais envie de faire un projet folk, du folk québécois comme Vincent Vallières et Beau Dommage. J’avais aussi envie d’explorer où je pourrais aller avec le folk.
D’où vient ton intérêt pour le folklore et le patrimoine québécois? Y a-t-il eu un moment quand tu étais enfant où ça t’a capturé?
En fait, c’est le contraire. Chez nous, mes parents n’écoutaient pas les amateurs de trad. Ils écoutaient beaucoup de musique, mais pas de trad. Pour moi, c’était une envie de découvrir le folklore moi-même en tant qu’adulte. J’ai rencontré Élisabeth Moquin, qui joue avec moi sur scène du violon, dans une formation en ligne pendant la pandémie. C’était de la composition et de la chanson dans le style trad. Pour moi, cette formation et cette rencontre m’ont donné la curiosité.
Comment as-tu découvert des choses après ça ou est-ce que c’était vraiment Élisabeth qui a ouvert les portes?
Dans la rencontre, il y avait aussi Marc Maziarde, qui est un autre musicien trad qui fait des trucs vraiment cool. Il fait les assemblages avec le trad, le jazz et la musique électronique. Les deux m’ont beaucoup donné de références et de choses à écouter. J’ai l’impression que c’est beaucoup comme ça dans le trad, une communauté où les gens se parlent entre eux et découvrent des trucs.
Y a-t-il des histoires ou des sujets en particulier que tu aimes le plus ou est-ce que c’est plutôt juste la musique?
Plutôt la musique, je dirais, mais le folklore écrit m’intéresse aussi. Sinon, c’est aussi beaucoup la danse. Ça fait un peu plus d’un an que je fais la gigue québécoise. C’est un autre moyen cool pour découvrir le folklore.
Où est-ce que tu fais de la gigue?
Il y a différentes façons de faire et de voir la gigue. Pour moi, c’est plus dans un contexte où je suis un cours et à la fin de l’année, on fait un spectacle. Mais, il y a des gens qui font la gigue pendant les jams et dans les spectacles de musique. Parfois, Élisabeth fait la gigue pendant les shows. Elle la fait aussi avec son band de trad qui s’appelle É.T.É. Il y a toutes sortes d’initiatives, comme les choses pour faire la gigue contemporaine qui mélange la gigue avec la danse moderne, dans un contexte différent.
Tes paroles sont poétiques, avec la fantaisie et les morales, alors c’est pour ça que j’ai demandé si la littérature t’inspire.
Je pense qu’il y a un souci que ça sonne québécois et folklorique, mais je ne dirais pas que je me suis plongé dans une étude des contes et de la mythologie. J’en ai lu, mais ce n’était pas une grande source d’inspiration.
En ce qui concerne la musique trad, y a-t-il des parties de la province où c’est plus marquant ou important dans l’histoire, que ce soit une ville ou une région?
Je sais que la région de Lanaudière est considérée un peu comme le berceau du trad au Québec. Moi, personnellement, je trouve que c’est très fort en Gaspésie. Quand j’y ai voyagé, j’étais exposé à ça. En allant visiter des amis qui restaient là-bas, il y avait des traditions musicales et les tounes de folklore qu’ils jouaient.
Quelles sont les références qu’on peut trouver dans les chansons de ton EP? Par exemple, L’hiver / Mattawa utilise des pièces instrumentales En fumant ma pipe de Jean Cousineau et Mattawa de Richard Forest, mais y a-t-il d’autres références, peut-être dans les paroles aussi?
J’ai composé Je voudrais être une rivière en m’inspirant d’une pièce de Louis « Pitou » Boudreault, un violoniste québécois. Sinon, ce sont plus des trucs modernes comme Paul Piché et même Daniel Bélanger.
Il y a beaucoup de références à la nature et la personnification de celle-ci. As-tu un lien personnel avec tout ça?
Je pense que mon rapport avec la nature est comme beaucoup de monde qui habite en ville, c’est toujours réconfortant d’être dans la nature. Quand je pense au Québec et aux choses que j’aime le plus du Québec, c’est le territoire qui est grandiose et magnifique. Pour moi, c’est le lien avec la nature.
Dans ton EP, le violon est évidemment un instrument qui est très fort. Quel était le rôle d’Élisabeth Moquin dans la création des chansons? Par exemple, est-ce que sa touche et ses inspirations t’ont ouvert l’esprit par rapport à la musique trad et le patrimoine en général?
Les arrangements étaient faits vraiment en groupe, par exemple il y avait aussi Jérémie Essiambre et Nathan Vanheuverzwijn. Le violon, je ne savais pas trop donc c’est Élisabeth qui l’a composé et elle a aussi donné les sujets et les pièces à intégrer dans l’univers, parce qu’elle connaît bien le répertoire. Pour tout ce qui sonne trad, c’est vrai qu’elle est importante dans la création.


Quelle est l’importance de continuer la musique trad et de lui donner une nouvelle touche parmi la musique actuelle?
Maintenant, avec mes pieds là-dedans, c’est la musique qui me touche et que je trouve magnifique. Les gens qui font du trad le font pour de bonnes raisons et c’est beau à voir. Il y a aussi l’idée qu’en tant qu’artiste, on cherche souvent les influences un peu partout et parfois d’ailleurs. Je trouve que c’est important qu’on valorise notre tradition musicale et pas juste la musique américaine actuelle ou comme la musique latine qui est super à la mode. Ça vaut la peine de revaloriser ce qui est à nous.
Tu as participé aux Francouvertes cette année où tu étais finaliste. Comment cette expérience a-t-elle influencé ton projet? Penses-tu que ton EP serait quand même sorti si tu n’avais pas participé?
Ça m’a vraiment donné confiance en ce projet. L’EP était déjà enregistré quand on a fait les Francouvertes et je n’étais pas sûr si je voulais le sortir ou si c’était juste pour le fun. Alors, ce concours m’a beaucoup motivé. Ça m’a fait apprendre beaucoup de trucs rapidement tel que comment présenter un projet aux gens.
Pour finir, quels sont tes plans et tes espoirs pour 2024 concernant Héron?
Ce que je veux faire, c’est jouer plus de shows avec le band, continuer à travailler sur la sonorité du groupe, créer des chansons et travailler sur un premier album. On a déjà quelques chansons que j’ai composées pour un album. Parallèlement, il y a Kinkead et on travaille sur le prochain album.

Frankie Rose | Journaliste
Frankie vient d’Angleterre, mais elle est francophone dans l’âme. Passionnée par les cultures francophones, notamment celle du Québec, elle aime découvrir et promouvoir la langue. En ce qui concerne la musique, elle aime les chansons qui racontent les histoires, que ce soit dans les paroles ou le lien personnel que la musique peut créer.
Crédit Photo : Louane Williams