
Dans le cadre de la Journée Bell Cause pour la cause, le documentaire Accro: troubles de dépendances sera diffusé le mercredi 25 janvier à 19h sur les ondes de Canal Vie, Canal D et RDS Info ainsi que le vendredi 27 janvier à 21h sur les ondes de Noovo, en plus d’être disponible sur Crave dès le 25 janvier. Dans ce documentaire, Marie-Mai rencontre des gens de tous les horizons qui souffrent ou qui ont souffert de troubles de dépendances de formes variées afin de comprendre les défis que vivent ces personnes au quotidien. J’ai pu m’entretenir avec elle à propos de ce projet.
D’abord, présente-moi Accro : troubles de dépendances.
Avec ce documentaire-là, on a vraiment voulu ouvrir la conversation, déstigmatiser les troubles de dépendances. Tu sais, on commence à en entendre parler de plus en plus; on commence à associer ça avec la santé mentale et à associer ça à une maladie. Mais même si on parle de maladie, même si on commence à le comprendre, force est d’admettre qu’on a encore dans notre bouche un vocabulaire où on se permet de dire « faiblesse » ou « manque de volonté ». Donc, je pense qu’il est grand temps qu’on ouvre notre esprit sur ces troubles-là et qu’on les traite comme des maladies, et non pas juste qu’on les nomme comme des maladies. Ce documentaire-là est rempli de témoignages tellement inspirants, d’histoires de réussites par rapport aux addictions.
Qu’est-ce qui t’a donné envie de prendre la barre d’un documentaire comme celui-là ?
J’ai côtoyé de près quelqu’un qui avait des troubles de dépendances, donc, pour moi, c’était important de me donner des outils pour mieux aider et pour avoir une meilleure compréhension de ça, aussi. Puis, je voulais donner de l’espoir à ceux qui le vivent, mais surtout aux proches, que ce soit un ami, quelqu’un au travail, quelqu’un qu’on connaît… Les solutions sont souvent beaucoup plus faciles à trouver qu’on pense. Tout part de l’écoute, de la compassion et de l’empathie. Il n’y a personne qui est à l’abri de ça. Il suffit qu’on vive un événement pour que tout chamboule.
C’est revenu dans toutes les entrevues que j’ai faites, on me l’a souvent répété : « Je n’avais pas de problème de consommation, tout allait bien, mais il y a eu ce moment-là, et tout a basculé ». Souvent, c’est comme ça que ça se passe. Pourquoi certaines personnes consomment-elles sans que ça soit un problème et que, pour d’autres, c’est le début de la fin ? Je voulais approfondir un peu ça, puis on se rend compte rapidement aussi que la consommation, à la base, ce n’est pas le problème; c’est souvent une résultante d’un autre problème, plus profond.
Ce n’est pas ta première fois comme animatrice, mais c’est la première fois que tu animes un documentaire. Comment t’es-tu préparée pour ton rôle ?
En fait, je voulais me laisser imprégner des entrevues que j’allais faire, donc oui, j’ai fait une recherche pour trouver les bonnes questions et trouver la bonne approche à avoir, mais en même temps, je ne voulais pas être trop préparée parce que je ne voulais pas avoir d’idées préconçues, non plus. Je voulais vraiment me laisser inspirer par ceux qui allaient être devant moi, puis vraiment recevoir leur témoignage, leur transparence et leur vulnérabilité d’un point de vue qui n’avait pas de jugements ou d’idées préconçues.




Tu y rencontres des spécialistes, la Dre Marie-Ève Morin, médecin de famille spécialisée en dépendances et en santé mentale et le Dr Patrick Bordeaux, professeur agrégé de psychiatrie à l’Université Laval. En quoi était-ce important pour toi d’inclure leur expertise et leur vulgarisation dans le documentaire ?
Tu le dis, en fait, c’est de vulgariser. C’est gros, tu sais, les troubles de dépendances; c’est profond, c’est tentaculaire. C’est complexe et c’est difficile de trouver les bons mots, des fois. Puis, d’avoir des professionnels qui, eux, font ça de leur vie et comprennent la complexité de la chose et sont capables de l’expliquer d’un point de vue où on fait : « Ah, je ne l’avais pas vu comme ça! » Je pense que c’est important dans notre processus pour éventuellement arriver à offrir une bonne aide à ces personnes-là.
Plusieurs types de dépendances sont abordés dans le documentaire, que ce soit la dépendance à la drogue, à l’alcool, au jeu, à la nourriture, au sport ou au sexe. Pourquoi avoir choisi de présenter un éventail varié de dépendances ?
Pour montrer à quel point la dépendance a plusieurs visages! On a vraiment tendance à faire une sortie de hiérarchie dans les dépendances. Dans notre tête, on dit souvent que les dépendances aux drogues sont pires alors qu’en vérité, la plus toxique, celle qui fait le plus de décès, c’est l’alcool. On a tendance à voir l’alcool comme moins grave parce que la majorité d’entre nous, on consomme de l’alcool. C’est comme : « Oui, c’est un problème pour lui, mais pas pour moi », donc c’est plus « accepté ». Après ça, on parle des dépendances au sexe, au sport…
Force est d’admettre qu’il n’y en a pas de hiérarchie. Quand ta dépendance crée un problème dans ton quotidien, quand ta santé commence à en être affectée, quand ta relation avec tes proches commence à en être affectée, c’est égal. Pour nous, c’était aussi de le dire, pour essayer de s’enlever aussi un peu de jugement par rapport à ça. Il n’y en a pas une pire que les autres. Tout peut devenir une dépendance. On en a tous, des dépendances, à certains niveaux. Il faut le reconnaître. Quand on est capable de le reconnaître chez soi, c’est plus facile de le reconnaître chez l’autre. Puis, si tu as de la compassion pour tes propres comportements, tu vas en avoir plus aussi pour ton prochain.
Penses-tu que le fait d’avoir impliqué des visages connus, appréciés du public, comme la comédienne Sophie Nélisse et la médaillée olympique Marianne St-Gelais, entre autres, pourra contribuer à déconstruire certains tabous ?
Absolument! Moi, je suis convaincue parce que, tu sais, pour des personnalités connues, de prendre les avants et de se montrer de façon vulnérable, il faut se rappeler que c’est beaucoup. On est dans l’opinion publique. On a une « image » à protéger, mais je pense que les plus grandes avancées sont quand on est transparents, quand on est honnêtes.
Si ces personnes-là sont capables de le faire et de montrer qu’il n’y a pas d’impact négatif à le faire, après ça, peut-être que la personne qui est dans le milieu ou qui n’est pas dans le milieu va dire : « OK, si cette personne a pris ce risque-là et qu’il n’y a pas de retombée négative, peut-être que, moi aussi, je suis capable de le faire, puis je ne perdrai pas ma job à cause de ça ou je ne perdrai pas d’amis ou ma famille n’aura pas de jugement par rapport à ça ».




L’approche du documentaire est bienveillante; il n’y a pas de jugement. C’est davantage une mise en lumière des troubles pour ouvrir la discussion. Penses-tu que cette approche davantage axée sur la compréhension pourra aider les gens qui vivent avec une dépendance et les gens qui ont un proche souffrant d’une dépendance ?
Je pense que oui. Ça inspire beaucoup. C’est difficile, des fois, quand c’est quelqu’un qui est proche de toi, de savoir comment aider, quoi dire. Je pense que ce documentaire-là, en plus d’inspirer ceux qui ont des troubles de dépendances, va aussi inspirer les proches et leur donner de bons outils pour pouvoir accompagner de la bonne façon.
Qu’est-ce qui t’a le plus marquée lors du tournage ?
Ah, tellement de choses! Chaque jour de tournage, je quittais le plateau complètement bouleversée, bouleversée par la résilience de ces personnes-là. Il n’y a pas eu de plus grand clash entre, justement, les idées préconçues de faiblesse et de manque de volonté, et de réaliser à quel point chaque seconde où ces personnes-là ne consomment pas et ne tombent pas dans leur addiction, c’est une réussite quand tout ce qui roule dans leur tête, c’est : « Consomme, consomme, consomme ». Que ce soit le sexe, que ce soit le sport, que ce soit les drogues, ce sont les personnes les plus résilientes que j’aie rencontrées dans ma vie.
Puis, ça tombe dans les maladies. Quand on parle de quelqu’un qui a un cancer, on parle de résilience. Ça, c’est une maladie qui est invisible, mais ça n’enlève pas la résilience que ces gens-là doivent avoir au quotidien pour ne pas retomber dans leur pattern. Je pense qu’un bel exemple, pendant le documentaire, c’est vraiment Marianne St-Gelais qui en parle. Je regarde son entrevue, puis à chaque fois, j’ai les larmes aux yeux parce qu’elle a été capable elle-même de vulgariser son cheminement à travers tout ça. On a besoin d’entendre ce genre de témoignage là.
Qu’espères-tu que les gens retiennent du documentaire ?
Qu’on peut s’en sortir, que des histoires de succès, par rapport aux dépendances, il y en a plus qu’on pense, puis qu’il n’y a rien de mal à avouer qu’on a un problème. C’est vraiment ça. À partir du moment où on voit qu’on a un problème, qu’on le nomme, c’est le premier pas vers la guérison.

Tu as déjà écrit une chanson abordant la dépendance, « Plaisirs amers », qui se trouve sur ton album Version 3.0. Est-ce un sujet que tu aurais envie d’aborder à nouveau éventuellement ?
Absolument! Premièrement, mention de te souvenir de « Plaisirs amers » parce qu’en effet (rires)! Mais oui, c’est certain que ça inspire. Elle a eu un impact, cette chanson-là, quand je l’ai composée, puis c’est sûr que j’ai toujours voulu faire ça; j’ai toujours voulu prendre des sujets qui me tenaient à cœur, puis écrire des chansons là-dessus pour potentiellement aider, que ce soit une personne, 200 personnes, 300 personnes, à travers une chanson qui peut amener à des réflexions. Ce n’est pas demain la veille que je vais arrêter!
2023 marquera tes 20 ans de carrière. À quoi peut-on s’attendre de ta part au cours de l’année ?
C’est sûr et certain qu’il va y avoir de la nouvelle musique! On va sortir des tounes à partir de cet hiver, puis l’album devrait sortir à l’automne. Moi, je vais me pencher sur cet album-là cette année. C’est super le fun d’être de retour en studio. Je veux vraiment faire un album qui englobe un peu tout mon cheminement musical, avec plein d’inspirations mélangées, donc je pense que ça va valoir le détour. On va commencer à sortir des petits avant-goûts comme ça dans les prochaines semaines jusqu’à l’automne.
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Crédit photos: Canal Vie

Samuelle Guimond | Journaliste
Samuelle est une passionnée de musique, de littérature, de télé et de théâtre. Si elle est journaliste pour le média, c’est dans le but de faire briller des artistes d’ici en qui elle croit, principalement à travers des entrevues. Tu pourrais très bien la croiser dans une salle de spectacle aux environs de Montréal!