
A partir des échanges avec sa grand-mère Pauline, que Camille Paré-Poirier a enregistrées lors de ses visites ou au téléphone, l’autrice et comédienne a d’abord créé un balado Quelqu’une d’immortelle qu’elle a ensuite adapté en version théâtrale. Cette adaptation intitulée Je viendrai moins souvent est présentée au Centre du Théâtre d’aujourd’hui jusqu’au 13 mai incluant les supplémentaires. Elle nous met face à une réalité émouvante!
« C’est beau de se rappeler quelqu’un qu’on aime. C’est ce que fait notre pièce. Camille nous parle de la relation privilégiée qu’elle a eue avec sa grand-mère Pauline. Une Pauline qui petit à petit se soustrait à elle-même, un soutien qui s’étiole», fait valoir le metteur en scène Nicolas Michon.
La voix de Pauline
Seule sur la scène, Camille commente et nous fait entendre des extraits des centaines d’enregistrements audio qu’elle a archivés de 2017 à 2021. Elle nous parle de la relation qu’elle a eue avec son aïeule. Un duo, avec une différence d’âge de 70 ans. Camille a 22 ans et Pauline en a 92. Un témoignage poignant qui vient nous chercher au plus profond de nous.
Par sa voix écorchée par l’âge, ses pleurs qui nous paraissent comme des rires tristes, ses angoisses, ses humeurs, Pauline nous entraîne dans sa descente psychologique et des différentes phases qu’elle vit au crépuscule de sa vie. C’est une personne qu’on aurait aimé connaître.
L’empathie de Camille
Pendant quatre ans, Camille s’est beaucoup investie dans ce projet dont le résultat est sans contredit comme un coup de poing qui nous secoue, nous ébranle.
Elle a conversé avec Pauline qui s’est déplacée d’une résidence à l’hôpital puis transportée au CHSLD pour finir ses jours. Institution que Camille surnomme à raison « les limbes ».
Par ses propos touchants, la dramaturge et comédienne nous relate avec beaucoup d’empathie les aléas de la vieillesse, la démence, les oublis, la colère face à cette dégradation cognitive, mais aussi la résilience. Avec crainte, on se dit que c’est peut-être ce qui nous attend!
Une mise en scène sobre et porteuse
La mise en scène de Nicolas Michon est réussie. Elle porte avec brio les conversations entre ces deux êtres qui s’aiment profondément.
Lorsque Camille aborde l’aphasie de sa grand-mère (trouble du langage auquel s’ajoutent souvent des difficultés de parole), elle engouffre des figues d’une telle façon qu’elle n’est quasiment plus capable de parler. Lorsqu’elle évoque le confinement qui l’empêche de se rendre auprès de sa grand-mère, elle se couvre d’un plaid et se cale confortablement dans un fauteuil.
Les accessoires choisis apportent également une authenticité à la pièce alors que l’éclairage efficacement concentré sur Camille renforce les émotions de celle-ci.
Quant à la musique très présente, elle est utilisée de façon sublime : tantôt les paroles de Pauline sont mises sur une musique de rap, tantôt Pauline accompagne Barbara avec la jolie chanson « Quand reviendras-tu? ». C’est attendrissant au possible!
À certains moments, on a de la difficulté à retenir ses larmes.
On en ressort bouleversé.
Je viendrai moins souvent jusqu’au 13 mai
Création de Camille Paré-Poirier en codiffusion avec le Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, la pièce Je viendrai moins souvent tient l’affiche de la salle Claude-Germain jusqu’au 13 mai incluant les trois supplémentaires.
Le balado Quelqu’une d’immortelle est disponible sur la plupart des plateformes.
Texte et interprétation : Camille Paré-Poirier
Mise en scène : Nicolas Michon
Conception sonore et régie son : Marie-Frédérique Gravel
Crédit photo : Valérie Remise
Texte : Micheline Rouette