Comme un cadeau avant Noël, le théâtre Jean-Duceppe nous offre jusqu’au 17 décembre l’excellente pièce N’essuie jamais de larmes sans gants tirée du roman du Suédois Jonas Gardell. Ce spectacle a été présenté au Trident de Québec, au printemps dernier, et a obtenu un succès dithyrambique. Une œuvre témoignage basée sur des faits vécus durant l’épidémie du VIH/Sida des années 1980 en Suède.
Contexte d’intolérance et d’ignorance
N’essuie jamais de larmes sans gants plonge le spectateur dans le Stockholm des premières « années sida » et nous éclaire sur le contexte de l’époque grâce à un travail de recherche approfondie.
À cet égard, l’adaptation de Véronique Côté nous introduit, avec aplomb et sans détours, dans cette période noire de la communauté gay où l’intolérance et l’ignorance de la population les conduisent au ban de la société, comme des parias.
Amour, sexe, liberté…
Le rideau se lève sur plusieurs cercueils noirs autour desquels apparaissent un vieillard, ensuite un jeune homme, un bouquet à la main. Avec tristesse, l’homme âgé l’interpelle en disant « C’est une honte ».
S’ensuit alors l’histoire de Rasmus et de Benjamin. Un couple éperdument amoureux.
Rasmus quitte son village et sa famille pour se jeter avec fougue dans sa nouvelle vie à Stockholm, où il espère pouvoir enfin être lui-même, dans l’anonymat.
Benjamin, de son côté, est affligé entre son appartenance aux Témoins de Jéhovah qui lui trace une voie religieuse « dans la sagesse » et le désir de tomber en amour avec quelqu’un qui lui rendra.
Ils font alors connaissance lors d’une nuit de Noël chez Paul, le refuge des gais désemparés.
Ils tombent amoureux malgré tous les interdits de leur milieu respectif. Ils ne se quitteront plus jusqu’à ce que la mort les sépare par une maladie inconnue à cette période, le VIH/Sida.
Mise en scène coup de poing
Le metteur en scène Alexandre Fecteau réussit avec brio à mettre le spectateur face à cette réelle tragédie humaine. Tout est réglé au quart de tour.
Les cercueils constamment présents sur scène nous montrent, sans ambages, la funèbre situation de ces hommes ostracisés que l’on considère à cette époque comme pestiférés.
Il se sert également de l’eau pour mettre en évidence l’urgence de la situation puisque la mort guette chacun.
Plus la pièce avance, plus l’eau est présente sur scène. Comme un bateau qui coule…
Musiciens et comédiens sur scène
Accompagnés de musiciens en arrière-scène qui renforcent le texte et l’émotion sur les planches, les comédiens évoluent de façon magistrale, sous la pluie, les pieds dans l’eau ou se jettent carrément dans l’eau.
Bravo à ces artistes qui par leur magnifique performance remplie de sensibilité nous touche de façon poignante!
Abolir les barrières
N’essuie jamais tes larmes sans gants est un portrait de société bouleversant, instructif et essentiel pour abolir les barrières. Ne ratez pas ce spectacle unique!
N’essuie jamais tes larmes sans gants jusqu’au 17 décembre
Production Le Trident et co-production de Nous sommes ici, la pièce est à l’affiche au Théâtre Jean-Duceppe jusqu’au 17 décembre.
Le 15 décembre aura lieu une rencontre avec l’auteur suédois Jonas Gardell qui sera sûrement très intéressante.
Mise en scène : Alexandre Fecteau
Traduction : Jean-Baptiste Coursaud et Lena Grumbach
Interprétation: Olivier Arteau, Maxime Beauregard-Martin,Gabriel Cloutier-Tremblay, Véronique Côté, Laurent Fecteau Nadeau, Hugues Frenette, Érika Gagnon, Jonathan Gagnon, Israël Gamache, Samuel La Rochelle, Carla Mezquita Honhon, Maxime Robin, Anne-Marie Bernard (pianiste), Marie-Loup Cottinet (violoncelliste), Jean-François Gagné (violoniste), Karina Laliberté (altiste)
Crédit photo : Stéphane Bourgeois
Texte : Micheline Rouette
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