
Après avoir enchaîné les succès pour son album Optimist Blues (Daniella Denmark, You’re My Ace, Freeze Time et Good Things) sous la maison de disque Warner Music, Jonathan Roy a décidé de sortir un quatrième album, My Lullaby, sur des bases solides : l’authenticité.
Ton album Optimist Blues est rempli de succès, mais tu t’en allais vers une voie qui ne te convenait pas. Peux-tu m’en parler ?
Dans la vie je pense qu’on a tous des hauts et des bas. J’étais dans une grosse compagnie de disque, Warner Music, avec Corey Hart aussi. Quand j’ai signé avec Warner Music, c’était pour me découvrir en tant qu’artiste. Ce qui est arrivé, c’est que tu te fais lancer tout plein d’idées de ce que les gens veulent de toi : « Tu devrais être comme ça, t’habiller comme ça, faire ces chansons-là, tu devrais faire ces covers-là. » Les gens voulaient le mieux pour moi, mais je me suis perdu là-dedans. Je ne savais plus qui j’étais et ce que je voulais faire. Chanter Daniella Denmark, je comprends le succès que cela a eu, mais à l’intérieur de moi, ce n’est pas exactement qui j’étais. J’avais besoin de fait un 360 pour trouver exactement ce que je voulais faire comme musique.
I was lost. J’étais perdu. Je ne savais plus si je voulais continuer à faire de la musique. J’ai tout vendu mes affaires et j’ai acheté un VR et je suis parti à l’aventure. Ce fut le début de ma découverte humaine. Je n’avais jamais pris le temps de me découvrir en tant qu’humain. C’était quelque chose qui était vraiment nécessaire pour moi. De ne pas avoir d’horaire, ni de patron et d’être freedom, je ne l’ai jamais eu. Je voyais des amis partir en backpack et voir le monde et je voyais à que ça leur faisait du bien. J’avais le goût de vivre des expériences. C’est ce que j’ai fait et ça m’a fait vraiment du bien.
Est-ce que ce fut l’étincelle pour redémarrer la machine ?
Non, ça s’est fait naturellement. J’y allais pour faire des découvertes et je me suis dit que je n’allais pas toucher à ma guitare et je ne ferai pas de musique. Après une semaine ou deux, j’ai réalisé que je n’étais pas capable. Je l’ai sortie et j’ai commencé à écrire et j’étais inspiré tout de suite en partant. Pendant mes deux ou trois ans, j’arrêtais à des endroits pour écrire. Je suis même allé en studio avec Brian Howes. En fait, la première chanson que j’ai finalisée (Keeping Me Alive). J’ai mis en doute les raisons pour lesquelles je faisais de la musique. Je ne comprenais plus pourquoi j’en faisais. C’était comme devenu un business pour moi, et ce n’est pas ce que je veux. Je veux que ça me permette de m’exprimer et d’avoir du plaisir.
C’est grâce à toute cette histoire que la chanson Keeping Me Alive est née. Elle parle de la pression extérieure que tu avais par ton père et ta compagnie de disque, mais aussi une pression que tu te mettais sur toi-même. Avoir écrit cette chanson-là, t’a-t-il libéré ?
100 %. C’est le début de tout. C’est là que j’ai compris que la pression que je mettais me nuisait énormément. Je devais lâcher-prise et c’est vraiment difficile de l’appliquer dans nos vies. On essaie de tout contrôler, c’est dans notre ADN. Je devais m’amuser et livrer le meilleur produit que je peux avec les chansons que j’ai écrites avec mes tripes.
Keeping Me Alive tout comme Lost a eu un gros impact dans la vie de plusieurs personnes qui prennent le temps de raconter leur histoire. Qu’est-ce que cela te fait de lire tout ça ?
Au début, j’étais vraiment surpris parce qu’il y en a beaucoup que ce sont des témoignages assez darks. Je réalisais que mes problèmes étaient petits contrairement à ce que certains vivent. J’ai réalisé que j’ai vraiment une belle vie. De voir que j’ai écrit une chanson et qui m’aide énormément et que ça l’aide d’autres personnes, c’est vraiment la cerise sur le sundae de voir qu’on peut toucher des gens comme ça. Toute ma vie, la musique m’a aidé. Je vivais un moment de difficulté, je mettais des chansons qui me faisaient du bien, je vivais un moment sexuel, je mettais une chanson sensuelle ou je vivais un moment entre amis, je mettais une chanson de festivités. La musique fait vraiment partie de nos vies. Je suis fier de contribuer à rendre des gens heureux ou les aider dans des moments difficiles.
La chanson Lost a été inspirée d’une histoire vécue. Peux-tu m’en parler ?
Mon meilleur ami vivait un moment difficile dans sa vie concernant la consommation et l’alcool. J’avais perdu mon meilleur chum. Je trouvais que c’était assez de le voir comme ça. Il sortait d’Occupation Double et il vivait quelque chose de difficile. J’ai fait une intervention avec Pézie et sa famille. On est allé chercher l’aide dont il avait besoin. Cela m’a marqué. J’ai par la suite écrit Lost qui parle de l’amitié qu’on a. Je trouve qu’il y a beaucoup de gens qui ont traversé des problèmes similaires. Je n’ai jamais eu ce problème-là. Si j’avais eu à tomber, j’aurais aimé que quelqu’un soit là pour moi. Il faut comprendre que c’est une maladie et parfois ce n’est plus un choix. Souvent, ils s’embarquent là-dedans parce que dans leur vie, ça ne va pas bien. Le vidéoclip Lost en parle beaucoup. Je trouve ça important d’aider les gens qu’on aime même si parfois c’est difficile. Je me rappelle la rencontre lorsque j’ai fait l’intervention. Les premiers pas ont tellement été difficiles. Mes premières paroles et de le regarder dans les yeux était difficile. Et pour lui, c’est d’accepter d’avoir ce problème-là et de recevoir de l’aide.
La chanson parle de cette relation-là et l’importance de se soutenir et de s’aider à passer à travers les moments les plus difficiles.
Tu as dit tantôt que tu étais toi-même perdu. Mais on peut dire que tu te diriges vers le droit chemin : 58 millions de vues sur YouTube pour Keeping Me Alive, My Lullaby est #1 sur ITunes Canada, tu es nommé au Canada Music Week. Qu’est-ce que cela représente pour toi ?
Je suis fier. Il y a une ligne de John Mayer que j’ai toujours admiré : « I made it happen for myself. » J’ai des gens extraordinaires qui m’entourent, qui m’aident tous les jours. Ma famille, mon manager, ma femme m’ont aidé à aller sur le droit chemin. Ils rendent ma vie plus belle. J’apprécie énormément mes fans qui depuis le début écoutent ma musique. Sans eux autres, je n’ai pas de carrière. J’apprécie tous les gens qui achètent l’album. Ils me permettent de faire ce que j’aime.
Je t’entends parler et visiblement la pression que tu te mettais pour Optimist Blues et celle que tu as pour My Lullaby est totalement différente. Ta vision de la vie est différente et tu sembles beaucoup plus serein !
Je me mets un certain stress parce que je veux être bon en entrevue ou sur scène, mais j’accepte qu’il y ait des choses que je ne peux pas contrôler. Ce que les gens ont pensé de mon album, c’est hors de mon contrôle. Ça me rentrait tellement dans la tête. J’écrivais des chansons pour les radios plutôt que d’écrire des chansons pour moi. Je le fais maintenant beaucoup plus pour moi et en même temps, les gens connectent beaucoup plus avec ce que je fais.
Pendant la pandémie, tu as décidé de te concentrer sur du contenu web. On peut dire qu’elle t’a été bénéfique.
Il y a eu beaucoup de positif lors de cette pandémie. Je sais que ce fut un moment difficile pour beaucoup. J’ai été chanceux : je n’ai pas perdu de proches ou personne n’a été malade. J’ai fait quelques pas vers l’arrière pour arranger quelques points sur ma carrière qui n’était pas à la hauteur. Je voulais faire du contenu web. Tout le monde est à la maison sur leur ordinateur ou sur leur cellulaire et on ne pouvait pas faire grand-chose. Je trouvais ça important de faire du contenu web sur YouTube et en même temps, ça donnait un peu de travail à mes boys. Ça nous faisait du bien de se regrouper de temps en temps pour créer du contenu pour les gens à la maison.
Cela nous a permis d’entendre deux versions acoustiques de tes chansons. D’où t’est venue l’idée ?
Ma base a toujours été folk et blues. J’ai toujours aimé les versions acoustiques. L’idée de la vidéo en plan séquence vient de ce que j’ai vu sur YouTube. Je trouvais cela tellement joli lorsque les gens réussissaient à faire des choses extraordinaires sur des one take video. Je me rappelle que Jean-François Breau et moi regardions des vidéos comme ça pendant Don Juan. On se disait qu’on devait faire des vidéos comme cela. On aimait comment la caméra bougeait et le focus in and out. On aimait cet art-là. J’ai décidé de l’appliquer avec des gens extraordinaires. Je pense à Sam Gauthier et Matt Cyr. Ce sont des gens avec qui je voulais travailler. On l’a fait et le résultat est extraordinaire.
Je pense à Lost qui est justement sortie il y a quelques semaines. Vous avez intégré des danseurs automatiquement cela devient plus complexe.
Tout doit être parfait. Le timing de tout : les caméras, les danseurs et les musiciens. Il faut penser à ce qu’on fait avec notre face, les notes qui sont jouées, la lumière… Je me rappelle durant Lost, on a eu entre 3 h et 5 h un moment parfait de lumières qui frappait à l’intérieur de l’église. On se disait : « On en fait 3 ou 4 de suite. On va l’avoir ! » Kim Richardson me regarde et me dit : « Jo, je ne suis plus capable. Ma voix commence à n’être plus là. » Je lui disais : « Ok Kim, on en fait une dernière. » Et à chaque fois, c’est la dernière prise qu’on prend ! Je ne sais pas pourquoi !
Vous donnez tout à la fin !
C’est peut-être ça ! Au début, c’est comme si c’étaient des répétitions. Avec Sam et Matt, après la sixième prise, on se dit souvent : « On l’a. Mais on va le faire jusqu’à 9 ou 10. » On est relaxe, on a la journée devant nous. On est plus relaxe et il y a quelques bonnes prises qui se font. En réalité, je n’ai même pas regardé la take 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 9. On s’est tous dit dans l’église que la 10e : « That was the one. » On ne s’est pas posé la question. Tout le monde le savait. C’était la même affaire pour Keeping Me Alive. Lorsqu’il y a de la magie qui s’opère entre la caméra et les musiciens, cela se ressent énormément.
Pour voir le résultat du tournage des deux plans séquences, rendez-vous au https://jonathanroyofficial.com/