
Une vague lilas a envahi la Place Bell le 11 juin dernier, à Laval, à l’occasion de la venue du populaire chanteur irlandais Dermot Kennedy.
L’interprète du succès Power Over Me, que l’on a pu entendre tourner sur toutes les radios au cours des dernières années, était de retour dans la province pour une première fois depuis trois ans. En mars 2020, il nous avait fait cadeau d’une salle comble à la Place des Arts, quelques jours avant la fermeture de tous les services non essentiels.
Depuis, l’artiste avait multiplié ses apparitions en direct sur ses réseaux sociaux, partageant des soirées complètes avec ses abonnés. Périodes de questions, performances intimes, écriture de nouvelles chansons, tout y est passé – en direct du confort de sa maison, au Royaume-Uni.
Ses adeptes étaient impatients de pouvoir enfin le retrouver dans leur chez eux afin de célébrer la sortie de son plus récent album, Sonder.
Pour une première fois ici, c’est dans une formule amphithéâtre que Kennedy se produisait ce soir-là, alors que nous avions eu l’habitude par le passé d’assister à de bien plus petits concerts au MTelus, entre autres.





Humble et authentique
Dermot Kennedy n’a pas besoin de sortir les artifices pour plaire : sa voix, rauque et puissante, a un grain et une tonalité uniques à elle-même. C’est à en oublier les animations sur les écrans et les jeux de lumière.
Son arrivée sur scène le représente bien. Les lumières se sont éteintes et aux écrans sont apparus les mots suivants, écrits à la main : « Cela fait tellement longtemps depuis la dernière fois que je vous ai vus et je me suis ennuyé, vous savez. » Aussitôt, les cris et les applaudissements se faisaient entendre. « Vous avez toujours été si puissants, vous voyez… pour mon âme, lorsque je vous entends chanter mes mots, je sais que je ne tomberai pas. Je suis si heureux d’être ici avec vous ce soir, Montréal. » Une bande lumineuse apparaît alors, laissant apercevoir le trentenaire qui débute avec sa toute nouvelle chanson, Blossom.
Kennedy commence en force, puisque malgré que ce soit son plus grand succès, la deuxième chanson qu’il interprète est Power Over Me. Cela prend énormément de confiance en son public – et en soi – de prendre une telle décision, mais visiblement, ce fût la bonne. Petits et grands chantaient et dansaient déjà.





En voyage
Tout au long de la soirée, l’artiste nous fait voyager entre deux époques : celle de son premier album, Without Fear, avec des animations plus sombres, plus graphiques, industrielles et celle de son deuxième et nouvel album, Sonder, où les paysages et les couleurs chaudes sont mis de l’avant, en douceur.
Tout un contraste et cela paraît tout au long de la soirée. Ce dernier opus nous paraît beaucoup plus commercial. Bien que ses mots et son talent soient fidèles à eux-mêmes, les sons empruntés et la promotion faite autour du disque sont loin de ce que l’on a connu des premières années de Kennedy. Le public semblait d’ailleurs plus attentif lors des performances des titres de celui-ci, tels que One Life et Better Days, alors que la différence était flagrante lors de l’interprétation de puissantes chansons comme An Evening I Will Not Forget ou After Rain.
Malgré cette inconstance de son public, l’Irlandais enchaîne ses pièces avec de magnifiques transitions entre elles. Cela se veut doux et naturel, on ne les voit parfois pas venir. Fidèle à lui-même, le chanteur prend peu la parole – il préfère communiquer par la musique et, comme il le dit, il sait que les gens sont là pour cela et ainsi, cela lui permet de leur en offrir plus.





Une voix retentit
À un moment, tout devient sombre, un faisceau lumineux mauve – comme l’album – illumine la salle et une voix, âgée, sage, mais inconnue, se fait entendre, s’exprime : « Les artistes d’ici et de partout autour du monde nous ont toujours invités à regarder le monde d’une nouvelle façon; de célébrer qui nous sommes; d’aspirer à devenir une meilleure version de soi-même; d’encourager la créativité et l’indépendance de notre pensée dont nous avons besoin pour remodeler les endroits où nous vivons, les rêves que nous recréons. » C’est la voix de Michael D. Higgins, président de l’Irlande, qui retentit dans une Place Bell attentive.
«Permettons-nous de continuer de rêver. Permettons-nous de continuer d’aimer. Permettons-nous de continuer à encourager, à créer. C’est à travers notre créativité que nous vivons », poursuit-il.
Des mots puissants que Kennedy avait aussi fait entendre, lors de son premier passage comme tête d’affiche au Electric Picnic en Irlande, en 2019. Des mots pour une nation, certes, mais des mots pour tous les artistes du monde, surtout.
Sur ces dernières paroles, la salle s’éclaircit et l’artiste entame Dreamer, de façon évidente.





Dermot, l’explorateur
Déjà à mi-chemin de la fin du concert, la suite s’enchaîne rapidement. Entre ses premiers et ses plus récents succès, Dermot Kennedy s’exprime davantage sur le sens de ses chansons. Profondes, elles nous donnent accès à lui comme un livre ouvert sur ses émotions et ses pensées et il accompagne ses adeptes à travers son parcours.
« Je vais vous demander de faire quelque chose avec moi, pour cette chanson. C’est quelque chose que je fais toujours, c’est tellement personnel, mais j’aimerais que ça représente quelque chose pour vous aussi. C’est, je crois, la plus belle chose à propos d’écrire des chansons – cela peut représenter tout ce que vous voulez. Donc, durant cette chanson, j’aimerais que vous essayiez du mieux que vous le puissiez, de revivre n’importe quel souvenir que vous avez qui vous semble parfait, qui vaut de l’or dans votre vie. Essayez de le voir, clairement, durant toute la chanson », poursuit-il. « Cette chanson est à propos du pouvoir de la mémoire, comment le bon souvenir au bon moment peut changer votre façon de penser et même, changer votre vie. Faites cela pour moi, fermez vos yeux, soyez là, vivez-le », ajoute l’artiste en introduisant sa chanson Rome.
Ce fut définitivement notre moment coup de cœur du spectacle. Bien que centrés chacun sur soi, nous pouvions sentir l’effet rassembleur de la musique ainsi que son pouvoir de changer les choses.




L’illumination
Entre deux segments de la pièce, il s’arrête, devant l’amphithéâtre éclairé par des milliers de petites lumières blanches. « C’est magnifique. J’aimerais simplement que cette lumière représente quelque chose pour vous, peu importe le moment que vous êtes en train de vous permettre de revivre, gardez-le lumineux, faites-le briller. Ne laissez pas cette lumière s’éteindre. »
Sans surprise, cette interprétation lui a valu une ovation s’étirant face à laquelle Kennedy avait peu de mots.
Pour une première fois ici, c’est dans une formule amphithéâtre que Kennedy se produisait ce soir-là… et bien que les aspects intimes et chaleureux se fassent moins ressentir qu’autrefois, nous ne pouvons qu’être heureux pour lui que sa carrière soit grandissante à ce point.
Dermot Kennedy sera de retour au Québec – à Québec, même ! – le 11 octobre prochain, au Centre Vidéotron. Présenté par le festival Cigale, c’est le groupe canadien Valley qui assurera la première partie du spectacle. Les billets sont actuellement en vente au : https://www.lecentrevideotron.ca/fr/2023/05/08/dermot-kennedy





Liste de chansons
- Blossom
- Power Over Me
- One Life
- An Evening I Will Not Forget
- Lost
- Dreamer
- Moments Passed
- Glory
- Rome
- Innocence and Sadness
- Outnumbered
- After Rain
- Without Fear
- Better Days
- Homeward
- Kiss Me
- Something To Someone

Catherine Lévesque | Journaliste
La première question que te posera Catherine en te rencontrant, c’est certainement à propos de musique. Grande passionnée de musique en tout genre, dès son plus jeune âge, celle-ci comprend que c’est à ses yeux, le plus merveilleux des moyens de communiquer. À travers ses mots et en parallèle à sa carrière en intervention sociale, Catherine profite de chaque opportunité pour offrir une belle vitrine à ses artistes préférés et à ses plus récentes découvertes. Tu risques fortement de la croiser dans un concert ici – ou ailleurs sur la planète.
